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Capital - La notation Fitch

 

 

 

UNE  CHRONIQUE

d’Alain Lemasson

(Capital.fr le 05 mai 2023)

   

 

Le trouble de la notation Fitch

 

 

La notation d’une dette souveraine traduit le niveau plus ou moins élevé de l’endettement à un moment donné et tient compte également d’un facteur important, la capacité de remboursement présente et future de l’emprunteur. Il faut observer à cet égard que l’abaissement de la notation Fitch de la France s’est produit plus d’un an après la constatation de la hausse de la dette dans le contexte exceptionnel de la pandémie. On peut en déduire que la décision négative de l’agence résulte d’un doute plus récent sur l’évolution des besoins d’endettement français. Il est difficile d’imaginer que la hausse des charges d’intérêts ait été déterminante, au moment précis où la baisse prochaine des taux est évoquée par la BCE.

 

Vus de l’extérieur, la persistance des conflits sociaux et des revendications ainsi que le grippage de la machine politique peuvent laisser penser que de nouvelles et importantes dépenses seront nécessaires pour apaiser les tensions présentes. Pour l’Agence, le facteur social est ainsi devenu le facteur principal de la difficulté future de remboursement d’une dette qui ne pourra qu’augmenter.

 

Il faut néanmoins avoir à l’esprit que la structure de l’endettement d’un emprunteur est un élément d’importance pour tout prêteur, banque ou marché. Le cas de la France est très particulier à cet égard puisque la dette en cours n’est pas vraiment remboursée. Chaque nouvelle émission d’obligations a en effet deux fonctions, le remboursement des obligations précédentes arrivées à maturité et le financement proprement-dit du nouveau déficit.

 

La restructuration de la dette française

 

Cette dette en augmentation continue a fait l’objet d’un traitement subtil de la part de la BCE, dont la politique initiée depuis 2015 a considérablement changé la donne. La dette de la France a été ni annulée ni réduite mais restructurée. Les rachats d’obligations dans le cadre du quantitative easing ont été en effet accompagnés de deux mesures d’importance, l’engagement du renouvellement des obligations échues et l’allongement jusqu’à trente années de leurs maturités. Ainsi devenue un troisième prêteur en alternative aux banques et aux marchés obligataires, la BCE a profondément modifié la structure de la dette française, dont elle détenait 48% en 2020 selon les statistiques du Trésor.

 

Le point de vue du banquier permet d’apprécier l’impact très particulier de ces mesures sur le bilan de l’État emprunteur. A une dette à très court terme renouvelée tous les six mois, jamais remboursée en capital, et donc en croissance permanente, s’est substituée pour moitié une dette à très long terme, assimilable à des quasi-fonds propres. Le paradoxe est ainsi que le risque de la dette française a été considérablement abaissé du fait de cette restructuration, une situation qui devrait conduire à l’amélioration de la notation.

 

Risque France et risque BCE

 

Les acheteurs d’obligations françaises doivent savoir en outre que la BCE ne pourrait pas accepter un défaut de paiement français, au risque de se mettre elle-même en danger. De leur point de vue, une partie importante du risque France s’est ainsi transformée en risque BCE. Tout aussi surprenante est l’apparente indifférence à l’actif du « bilan France ». Les investissements étrangers en France renouvelés d’année en année - le private equity notamment - auquel s’est ajouté un soutien public de grande envergure ont permis le développement constant de nouvelles activités, expliquent en grande partie la diminution considérable du chômage.

 

Toutes ces observations conduisent à s’interroger sur les raisons de l’analyse négative de Fitch. L’anticipation d’une crise sociale aggravée demeure l’hypothèse la plus plausible, ce qui pose en quelque sorte le problème des prophéties auto-réalisatrices. Les éventuelles réactions des autres agences de notation permettront de confirmer ou non le changement de méthode que la notation Fitch semble avoir révélé. 

 

Alain Lemasson

Ancien banquier – Fondateur d’infofi2000

 

 

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16/05/2023